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Film : Le Prestige de Christopher Nolan

Adaptation du roman Le Prestige de Christopher Priest

MAGICIENS ET SCIENTIFIQUES : AU-DELÀ DE LA COMPRÉHENSION HUMAINE

Tout est une question d’époque, tout est une question de connaissances.

Hier, j’ai regardé Le Prestige, film de Christopher Nolan, avec Christian Bale, Hugh Jackman et Scarlett Johansonn dans les rôles principaux.

Le choix du programme s’est fait un peu par hasard, je l’avoue. Je craignais que l’on me ressorte l’histoire d’un pétrolier qui coule et d’une bonne vieille marée noire sur les côtes bretonnes. Et rêver toute la nuit de galettes de mazout et de mouettes à l’agonie ne semblait pas alors une perspective bien folichonne… Rien de tout cela, soyez donc rassuré ! Le Prestige, en fait, raconte l’histoire de deux magiciens.

Présentation d’un numéro par Monsieur Augier (Hugh Jackman) et son assistante (Scarlett Johansonn)

Ouiii, des magiciens ! Avec des colombes, des foulards, et des pom-pom-girls toutes mimis dans leurs costumes de scène !

Le Prestige est avant tout un film d’époque, se déroulant en 1897 dans le glorieux Londres, à une époque où les hauts de forme fleurissaient autant que les écureuils dans les jardins royaux, et probablement que les spectacles de rue dans le quartier de Soho. Vous voulez voir le Royal Albert Hall dans ses débuts ? Les vieux théâtres des alentours de Covent Garden ? Vous êtes sur la bonne voie. 68 décors ont été recréés pour le tournage à partir de clichés photographiques des années 1890. Paradoxalement, ce film est également classé dans le rayon science-fiction et vous allez comprendre pourquoi. 

Nous retrouvons donc nos magiciens chevronnés, obsédés par l’idée de marquer l’histoire grâce au plus spectaculaire tour de magie du monde. Pour réussir à épater la populace, une seule solution : inventer le plus fantastique prestige.

Cutter (en voix off à la fin du film) : « Chaque tour de magie comporte trois parties, ou actes. Le premier s’appelle la promesse : le magicien vous présente quelque chose d’ordinaire. Le deuxième acte s’appelle le tour : le magicien utilise cette chose ordinaire pour lui faire accomplir quelque chose d’extraordinaire. Mais vous ne pouvez vous résoudre à applaudir, parce que faire disparaître quelque chose est insuffisant, encore vous faut-il le faire revenir. Alors vous cherchez le secret, mais vous ne le trouvez pas parce que, bien entendu, vous ne regardez pas attentivement. Vous n’avez pas vraiment envie de savoir… Vous avez envie d’être dupé. »

Michael Caine, Le Prestige (2006), écrit par Christopher et Jonathan Nolan

Le troisième acte s’appelle évidemment le prestige. Il s’agit du moment de gloire où l’extraordinaire cesse et où chacun est ébahi.

Angier (Monsieur Jackman) et Borden (Monsieur Bale) vont donc s’affronter dans une course intellectuelle géniale, sans vraiment s’inquiéter des réactions terrifiées des tiers non-initiés : femmes, enfants, spectateurs volontaires et consentants pour se faire couper en deux.

Ceci est un film de magie qui tourne mal. Vous y trouverez des doigts cassés, des mains mutilées, des jambes dans le plâtre, et au passage quelques pendus et noyés.

Les magiciens, je vous le dis, étaient de véritables monstres.

Alfred Borden : Son tour est épatant. Il disparaît et réapparaît instantanément de l’autre côté de la scène, muet, avec un excès de poids et, si je ne me trompe, imbibé d’alcool. C’est incroyable, comment fait-il ?

Christian Bale, Le Prestige (2006), écrit par Christopher et Jonathan Nolan

Même si on regarde nos récentes années 2000, l’intérêt pour la magie a toujours autant le vent en poupe. Depuis la nuit des temps (je n’y étais pas, mais je vous l’affirme), jusqu’à ce jour : craignons la magie. 

Des doigts de nos amis à moustaches, barbichettes ou rouflaquettes (ou selon l’imaginaire, à chapeau pointu) se produisaient vingt milles phénomènes extraordinaires : apparitions, disparitions, évasions incompréhensibles, lévitations, téléportations… La magie a toujours été la prémisse de la science-fiction.

Ce n’est pas sans raison que les magiciens ont rejoint et intégré les cirques à soi-disant « monstres », dans le même ordre d’idée que les créatures de Freaks « la monstrueuse parade », le merveilleux film de Tod Browning sorti en 1932. Plus récemment, dans The Greatest Showman, Hugh Jackman (encore lui), en tant que Monsieur Loyal et concepteur du cirque Barnum utilisait sa formidable imagination pour créer des illusions à la fois terrifiantes et merveilleuses. L’accueil réservé aux magiciens n’était pas toujours très bon. Dans ce deuxième film, les réfractaires finiront par mettre le feu au chapiteau.

Pourquoi ? Ben parce que tout ce qui est incompréhensible fait peur, pardi !

Pensez-donc à Gandalf le gris dans Le Seigneur des Anneaux (javélisé au cours du deuxième tome pour devenir Gandalf le blanc) qui se faisait envoyer sur les roses par le Rohan et à qui on disait sommairement en s’adressant à son épaule : « Gandalf ! tss ! Il n’est pas le bienvenu ! »

Pensez à l’univers d’Harry Potter, dans lequel les moldus (vous, moi…) craignent les sorciers, et vice-versa les sorciers craignent les moldus. Vous faîtes un tour de magie, on vous aperçoit, pouf, effacez-lui l’esprit par simple précaution. On ne sait jamais, on ne va quand même pas risquer une nouvelle Salem !

La magie fait peur. Mais en même temps… la fascination pour les superpouvoirs des magiciens nous tient en haleine depuis fort longtemps. Disney nous l’a prouvé par ses dessins animés : Mickey l’apprenti magicien, Merlin l’enchanteur, Mary Poppins ou même plus récemment, la Reine des Neiges. Quelle petite fille de nos jours échappe à l’envie d’envoyer des montagnes glacées dans le décor d’un tour de manche ?

Robert Angier (à Borden) : Vous n’avez jamais compris pourquoi on le faisait. Les spectateurs connaissent la vérité. Le monde est simple, misérable, si figé d’un bout à l’autre. Mais si vous pouvez les duper, ne serait-ce qu’une seconde, vous les faites rêver, et alors vous découvrez quelque chose de très spécial. Vous ne voyez vraiment pas ? C’est cette lueur dans leurs yeux.

Hugh Jackman, Le Prestige (2006), écrit par Christopher et Jonathan Nolan

Saviez-vous qu’il existe des écoles de magie en France ?

Le Centre International de la Prestidigitation et de l’Illusion organise à la Maison de la Magie de Blois des week-ends de formation à destination des magiciens amateurs.

A Paris, vous pouvez trouver également un certain nombre de lieux pour apprendre vos tours et acheter vos accessoires truqués. (Je brise le mythe, je sais.)

Si les enfants sont les principaux spectateurs, nous, adultes, ne sommes pas en reste : les succès des films Marvel ou DC Comics, tirés des comics américains vieux de cent ans, montrent que nous aimons toujours autant la magie et le merveilleux. La magie a pris d’autres formes cependant, et certes, Iron Man ne ressemble pas vraiment au Prospero de Shakespeare (La Tempête). Mais l’esprit est toujours là. Nous attendons des prouesses de l’humain, et ces prouesses, si elles ne peuvent totalement être expliquées par le surnaturel, sont désormais le fruit d’avancées scientifiques majeures.

Revenons au Prestige de Christopher Nolan, maintenant. Parce que voilà, comme je vous l’ai dit, tout y a déjà été réfléchi. Puisque Monsieur Augier (Hugh Jackman) peine à inventer de nouveaux tours, il va recourir aux moyens technologiques de l’époque pour surpasser son adversaire.

Oh, mais comment ça fonctionne ? Extraordinaire !

Cutter : Ceci n’est pas l’œuvre d’un magicien. Cela a été fabriqué par un sorcier, un homme qui accomplit ce que les magiciens prétendent faire.

Michael Caine, Le Prestige (2006), écrit par Christopher et Jonathan Nolan

Voilà comment nous nous retrouvons soudain projetés en Amérique, à la recherche de Nikola Tesla (incarné à l’écran par David Bowie), inventeur de la bobine Tesla et du courant alternatif. Ce que la magie n’apporte pas, la science y pourvoira. 

Les scientifiques, les médecins, les astrophysiciens et tous ceux qui s’attachent à repousser les limites de la connaissance sont aussi des magiciens après tout. Depuis Galilée, condamné en 1633 pour hérésie et jusqu’à nos scientifiques récents, nous craignons toujours autant (avouons-le) les progrès scientifiques. C’est ainsi que naissent les débats éthiques, sur ce qui est bon de rechercher et sur les sujets qui valent mieux être laissés de côté. (Les OGM, le clonage…)

C’est ainsi aussi qu’apparaissent les grandes conspirations. Toujours sur fond de magie : l’homme a-t-il vraiment marché sur la lune ? La terre n’est pas vraiment ronde ! Les trous noirs existent-ils ? Le boson de Higgs, tout ça… Je me rappelle de la super théorie du trou noir recréé artificiellement en laboratoire, dont on nous avait prédit qu’il allait se développer, grossir jusqu’à engloutir la terre tout entière. (Et hop, fin du monde.)

Oui, nous avons encore des magiciens.

Et nous payons encore des billets pour assister à leurs spectacles. Leurs noms ont changé, aujourd’hui passer un anneau à travers un autre ne suffit plus. Nous parlons hypnose, nous parlons mentalisme. Nous imaginons même toujours (à l’instar des super héros) que les magiciens peuvent venir en aide au gens. (Patrick Jane, je te pointe du doigt. Série du Mentalist.)

Nous pensons qu’ils peuvent avoir de belles qualités humaines cachées sous leurs capes. Les magiciens ont cessé de faire peur, ils ont été réhabilités dans la société.

Quand il n’y a ni science ni surnaturel à la clef, alors, nous nous émerveillons devant leur intelligence. (Sherlock Holmes n’est-il pas un peu magicien ?)

Mais nous aimons toujours, plus que tout, percer leurs astuces. (Magic in the moonlight, de Woody Allen) Les choses ne changent guère…

C’est ainsi que nous rendons moins monstrueux et plus attachants ces personnages. Notre besoin de compréhension est insatiable et pour accepter l’inexplicable, nous demeurons perpétuellement en quête d’indices.

Sur ce point, le Prestige de Christopher Nolan remplit pleinement son objectif. À la fin, vous comprendrez tout. =) Je ne vous en dis pas plus, le film est construit comme un tour de magie.  

Le lapin dans le chapeau a encore de belles années à vivre.

Sources : Wikiquote et Allociné

4 commentaires sur « Film : Le Prestige de Christopher Nolan »

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